WAFT
Well-being, Autism and neurodevelopmental disorders, Families, Teachers and caregivers
Présentation
© Damien Ridremont
Bien-être des personnes autistes (ou ayant un trouble du neuro-développement), des familles, et des enseignants et aidants professionnels
Le programme WAFT est un programme de recherche visant à étudier et améliorer le bien-être des personnes autistes* (ou ayant un trouble du neuro-développement), de leurs familles et des professionnels les accompagnant (enseignants, éducateurs, aidants professionnels, etc.). Le programme s’inscrit donc dans une approche systémique, en s’inspirant du modèle éco-systémique de Bronfenbrenner (1979).
Ainsi, dans le cadre de ce programme, nous partons du postulat qu’il existe des interactions entre différents systèmes qui sont connectés à la situation de la personne autiste, et qui peuvent être influencés par celle-ci, et/ou qui peuvent l’influencer. Malgré l’existence de caractéristiques communes, la grande hétérogénéité dans les formes cliniques du trouble du spectre de l’autisme (TSA) nécessite une adaptation de la part de tous les milieux de vie, et notamment des milieux familial et scolaire. Cette expérience peut constituer une source importante de stress pour les familles après l’annonce du diagnostic, mais également pour les enseignants et professionnels qui estiment ne pas être préparés pour répondre aux besoins éducatifs particuliers des élèves autistes.
L’objectif du programme WAFT est donc de mieux connaître et comprendre les facteurs de risque et de protection pouvant affecter le bien-être des personnes autistes et des personnes qui évoluent autour d’elles (famille, enseignants, professionnels, etc.), dans le but de conseiller et/ou de proposer des interventions visant à améliorer le bien-être de tous. Si la notion de « bien-être » englobe de nombreuses variables à la fois physiques et psychologiques, dans le cadre du programme WAFT, et au regard du modèle transactionnel intégratif de Bruchon-Schweitzer (2002), le bien-être est considéré comme un critère d’adaptation et de santé et est apprécié à travers plusieurs variables telles que : le stress perçu, le sentiment d’auto-efficacité, les stratégies de coping, la qualité de vie, les symptômes anxieux et dépressifs, l’épuisement professionnel (burnout), etc.
La Professeure Émilie Cappe (Université Paris Cité) est la responsable scientifique du programme WAFT. Les collaborations de recherche, grâce auxquelles le programme est possible, sont à la fois interdisciplinaires et internationales. Elles incluent des chercheurs de diverses disciplines des Sciences Humaines et Sociales (Psychologie, Sciences de l’Éducation, etc.), ainsi que des chercheurs français et internationaux (États-Unis, Québec, Suisse, Belgique, Liban, etc.).
Le programme WAFT se divise en trois axes de recherche, chaque axe se centrant sur un des systèmes. Le premier axe vise à étudier et améliorer le bien-être des personnes autistes elles-mêmes. Le second axe se centre sur le bien-être de la famille des personnes autistes. Enfin, le troisième axe s’intéresse au bien-être des enseignants et des aidants professionnels travaillant auprès de personnes autistes. Venez découvrir les objectifs des différents axes du programme ainsi que les recherches (études et thèses achevées et en cours) intégrées à ces axes pour vous faire une idée plus précise de nos travaux.
* D’après les recommandations d’Autisme France et Autisme Europe, et en conformité avec les recommandations de la Convention des Nations Unies relative aux Droits des Personnes Handicapées, l’expression « personne autiste » est utilisée afin d’éviter la connotation négative du terme trouble.
Qu’est-ce que le Trouble du Spectre de l’Autisme (TSA) ?
La version révisée de la cinquième édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5 TR ; APA, 2022) caractérise le TSA par des « déficits persistants dans la communication sociale et l’interaction sociale dans de multiples contextes, tels que manifestés par tous les éléments suivants : déficits dans la réciprocité socio-émotionnelle, dans les comportements communicatifs non verbaux utilisés pour l’interaction sociale, et dans le développement, le maintien et la compréhension des relations ». Les premières manifestations s’observent lors de la petite enfance et limitent de façon significative le fonctionnement adaptatif (APA, 2022).
Trois niveaux de soutien, allant de « nécessitant de l’aide » à « nécessitant une aide très importante », décrits par le DSM-5, permettent de considérer la sévérité des difficultés de communication sociale et des comportements. Plusieurs comorbidités sont liées au TSA, telles que les troubles anxieux, le trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDA/H), les troubles de l’humeur, et le handicap intellectuel.
La présence d’un TSA entraîne des répercussions sociales et cognitives importantes pour la personne touchée. Sur le plan des interactions sociales, la personne autiste présente des difficultés à utiliser les indices non-verbaux (contact visuel, gestes, mimiques faciales) permettant d’établir et de maintenir une relation sociale, ainsi que des déficits du langage sur les versants expressifs (absence de langage, écholalies, incohérences syntaxiques et logiques) et réceptifs (confusions sémantiques, difficultés à comprendre le langage abstrait, etc.). Sur le plan des comportements et des activités, elle manque généralement d’initiative, présente des comportements stéréotypés, a des intérêts particuliers et se montre sensible au changement ou à la frustration, etc. Sur le plan cognitif, le TSA s’accompagne dans 26 à 68 % des cas d’un handicap intellectuel (QI < 70) et d’un fonctionnement sociocognitif singulier, marqué par des perturbations dans le traitement et l’intégration des informations (mouvements biologiques, visages, voix humaines, émotions), par des retards d’acquisition et des développements atypiques de la sensorialité, de la motricité, de l’imitation, des fonctions symboliques, de la mémoire, des fonctions exécutives, de l’empathie, de la théorie de l’esprit, etc. Ceci entraîne des difficultés de compréhension du monde dans lequel la personne autiste évolue qui conduisent généralement à des comportements perturbateurs, de fuite ou de repli, pouvant gêner les relations avec son environnement.
La prise en charge de l’autisme : le contexte français
Pour répondre aux besoins des personnes autistes, des interventions adaptées à leurs spécificités sont recommandées par la Haute Autorité de Santé, en particulier celles à visées développementale, éducative et comportementale ou focalisées sur la socialisation, le langage et la communication, ou encore la sensorialité.
Tous les 5 ans, les Plans Autisme et Stratégies Nationales sont publiés en France pour donner les orientations et priorités en termes de recherche, d’accompagnement et de prise en charge de l’autisme. La dernière Stratégie Nationale pour les troubles du neurodéveloppement (2023-2027) présente ainsi six engagements, dont plusieurs sont en lien avec les axes du programme WAFT. En effet, la nouvelle stratégie préconise d’amplifier la recherche sur l’autisme, d’intensifier la formation des professionnels (Axe 3 du programme WAFT), d’adapter la scolarité aux élèves et aux étudiants autistes (Axe 1), et de faciliter la vie des personnes autistes et de leurs familles (Axes 1 et 2).
En parallèle, la loi du 11 février 2005 puis la loi du 8 juillet 2013 ont contribué à favoriser la scolarisation des enfants présentant un handicap et donc celle des enfants autistes. Ainsi, une scolarisation, en inclusion complète en classe ordinaire avec un accompagnant (AESH) ou en Unité d’Enseignement en Maternelle (UEM) et en Unités Localisées pour l’Inclusion Scolaire au primaire, collège et lycée (ULIS), peut aussi être proposée. A l’université, levier crucial pour l’intégration sociale des jeunes adultes autistes, les services disponibles pour soutenir les étudiants autistes ne sont pas encore suffisamment développés, malgré les ambitions annoncées dans la Stratégie Nationale pour l’Autisme. Pour améliorer l’inclusion des étudiants à l’université, le réseau Atypie-Friendly a été créé en réunissant de nombreuses universités pour mener des actions locales et nationales en faveur de l’inclusion.
Néanmoins, les variabilités concernant l’évolution et la disparité des prises en charge sont toujours d’actualité et contribuent à renforcer l’hétérogénéité du handicap. En effet, une insuffisance en matière d’interventions spécialisées demeure, alors que le nombre de rapports, de circulaires et de lois sur l’accompagnement des personnes autistes et de leur entourage se multiplie depuis ces dix dernières années.
En France, depuis quelques années, les démarches diagnostiques se sont améliorées avec des évaluations plus précoces et des temps d’attente diminués. Cependant, nombreuses sont les familles qui restent ensuite, après l’annonce du diagnostic, privées de structures et d’accompagnement adaptés aux besoins et à l’âge de leur enfant. De plus, même si les interventions les plus répandues s’appuient maintenant sur les méthodes psycho-éducatives, certaines familles françaises n’y ont pas encore ou très peu accès.
Contribuer à la recherche sur l’autisme en France, c’est donc contribuer à la sensibilisation des politiques publiques à cette question pour favoriser des décisions en faveur des personnes autistes et de leurs proches, et accélérer la mise en place de dispositifs adaptés.
Pour aller plus loin
- American Psychiatric Association. (2023). Diagnostic and statistical manual of mental disorders (DSM-5-TR®). American Psychiatric Pub ;
- Barthélémy, C., & Bonnet-Brilhault, F. (2023). L’autisme : de l’enfance à l’âge adulte. Médecine Sciences Publications ;
- Derguy, C., & Cappe, E. (2019). Familles et trouble du spectre de l’autisme. Dunod ;
- Plumet, M. H. (2014). L’autisme de l’enfant : un développement sociocognitif différent. Armand Colin ;
- Rogé, B. (2022). Autisme, comprendre et agir. Dunod.